30/06/2010

Que le meilleur gagne!

On nous parle souvent d'hégémonie culturelle, de coutumes mises en péril, de bigmactisation de la planète. Avec Bush et BP, elle est responsable des plus grands maux de notre planète. La mondialisation. Elle compte beaucoup plus d'ennemis que de namis. Ce discours m'agace. C'est comme un dalmatien: trop noir et blanc (oh la la......).

On mange, on fait l'amour, on dort, on travail et le cycle recommence. Un être humain, qu'il habite l'Utah ou le Yunnan, est partout une seule et même créature. La langue, le drapeau et les coutumes changent, mais nous sommes tous faits des mêmes viscères. Un Américain a autant besoin d'amour qu'un Chinois, un Serbe veut qu'on respecte sa dignité au même titre qu'un Croate. Je ne m'aventurerai pas dans la complexité des questions identitaires, les exemples qui serviront mon propos seront d'un tout autre ordre.

Prenez Fields of Gold de Sting. Le guitariste caresse les cordes de son instrument pour en extraire une mélodie aussi suave que sirupeuse. La cornemuse aux accents gaéliques à la fin du refrain fait succomber les critiques les plus froids. C'est LA référence en terme de balade romantique-adulte-pop-contemporain (une radio sur le satellite que je vous invite à syntoniser incessament). Et on on la joue partout, justement parce que personne n'a trouvé une meilleure balade du même genre. Peu importe leurs différences; l'Ouzbek comme le Russe vibrent à l'écoute de la prose du chanteur anglais. Fans de Toni Braxton, ne prenez pas les armes. Clore le débat sur les balades aussi vite c'est sûrement un peu présomptueux de ma part.

La mondialisation, c'est une sorte de communion entre tous les êtres humains. Un pont qui nous permet enfin de connaître M.I.A. et de tripper ensemble sur ses chansons. Ou d'apprécier le thon rouge comme il se doit, c'est-à-dire saisi quelques secondes à la japonaise. Je travaillais dans un resto italien haut de gamme il y a deux ans et on servait un thon "à la manière des Pouilles" -la région qui forme le talon italien- mais tout de même cuit de cette façon. J'avais demandé au boss si les Italiens le cuisaient comme ça eux-aussi, étonné par le look sushi du plat. On m'avait répondu qu'à l'origine non, mais qu'un consensus s'était formé à propos de la meilleure façon de l'apprêter. Le talent nippon avait donc traversé les frontières pour le plaisir de nos papilles et aux dépens des traditions culinaires méditérranéennes. La qualité avait parlé.

La mondialisation repose sur une logique de compétition. Les remparts de la distance étant désormais abattus, le producteur de litchi de Thaïlande se retrouve face à face avec celui de Nouvelle-Zélande. Cette lutte produit des résultats bénéfiques lorsqu'elle est juste. Si le Thaïlandais produit des meilleurs litchis, ou les produit à un coût moindre, le Néo-zélandais devra se trouver une nouvelle job. En économie, on parle de spécialisation et d'avantages comparatifs. C'est la malhonnêteté qui entrave les bénéfices de cette compétition. Des subventions excessives aux producteurs si on reste dans notre exemple de litchis. De pareilles subventions aux États-Unis privent de nombreux pays africains d'un marché pour leur production et les font crever de faim. Dans ce cas, une malhonnêteté criminelle qui perdure depuis des années.

Pour ceux que j'ai perdus dans cet exemple un peu technique, on peut voir dans la musique qui tourne à la radio une situation analogue peut-être plus intelligible. Si les Black Eyed Peas, malgré toute les cochonneries dont ils sont capables, tournent encore autant, ça ne relève pas du hasard. Je ne pense pas apprendre rien à personne; une puissante machine de marketing et des dizaines de milliers de dollars les ont ammenés là où ils sont. Elle est là l'injustice. Cette hégémonie bloque l'émergence des créateurs plus talentueux, et prive l'auditeur moins curieux de tellement de richesse. C'est déplorable pour les deux extrémités de la chaîne. Celui qui produit et celui qui devrait recevoir.

Vive la mondialisation donc, mais surtout vive une mondialisation juste qui ferait connaître plus de John Lennon, de savoir-faire asiatique, de cinéma russe et donnerait une chance aux producteurs sénégalais. Que le meilleur gagne!

25/06/2010

Playlist

Comme Rocky, mon entraînement pour le marathon pourrait faire l'objet d'une scène en accélérée avec musique entraînante. Tout ce qu'il manque depuis début mars, c'est l'épaisse couche de neige de Sibérie orientale dans laquelle je tirerais un ami en traîneau. Qu'à cela ne tienne, je m'invente des scénarios épiques dans ma tête, et par le fait même m'attire des regards inquiets à cause de mon visage presque en transe. Les traits tirés, mon souffle d'asthmatique, le regard qui fixe l'horizon avec aggressivité... j'effraie les sept à soixante-dix-sept ans.

Blague à part, comme je vous l'ai dit récemment, la course est un formidable moment d'introspection. Une heure durant laquelle mon monologue intérieur n'est gêné par aucune stimulation extérieure, sinon la contemplation de ce qui m'entoure, le beau comme le laid. Un paradoxe que je n'ai pas réussi à comprendre demeure: c'est une activité que je trouve terriblement plate, mais qui m'apporte en même temps tellement. Le yoga par contre, ça c'était vraiment trop plate. Vous connaissez mon affection pour la médecine alternative et les pratiques asiatiques millénaires. Probablement que ce sont mes idées de triomphe et de dépassement de moi-même -et des autres- qui me font continuer à courir. Ou encore cette image si poignante des noirs aux jeux olympiques de Mexico que j'ai souvent en tête et qui m'inspire tant.

Il y a aussi la musique qui joue un rôle crucial. Des chansons dont j'ai tout extrait tellement elles ont joué dans mes oreilles. Elles me me poussent dans le dos quand je vois le f**k that s'approcher. Les voici:

Le hip-hop est essentiel pour la course. Les guns, les chars, les filles, ça donne l'impression d'être le maître du monde.
1. Power, Kanye West ft. Dwele
2. Amazing, Kanye West ft. Young Jeezy
3. Fire, The Roots ft. John Legend
4. I'm me, Lil Wayne
5. Hustler's Ambition, 50 cent
Ensuite, c'est l'électro, parce que l'énergie vient à manquer après un certain temps. Ça prend un rythme qui te garde en vie, une sorte de mirage pour tes muscles et ton esprit épuisés.

1. Sweet Light, Boys Noize
2. Bonafied Lovin', Chromeo (Remix de Riot in Belgium)
3. Digital Love, Daft Punk
4. Running Man: Nike+Original Run, The Hives et surtout A-trak. Deux mix qui ont été commandés par Nike spécialement faits pour l'entraînement. Beau coup de marketing.

Finalement, quand on s'est senti tout-puissant et que nos oreilles bourdonnent à cause de la distortion, un peu de sérénité: Where Do The Children Play, Cat Stevens.

Un jab dans face en arrivant et un uppercut dans le ventre en repartant.

C'est ça aller étudier à l'étranger.

23/06/2010

Cicatrisation inachevée

Si vous voulez des vraies sensations fortes, Pour faire une histoire courte vous suggère une ballade dans les rues de Split avec votre chandail de l'équipe nationale de Serbie. Non seulement Split est la deuxième ville de Croatie, mais ses supporters sont reconnus pour leur conversion brusque en sauvages les jours de match. On rapporte que la haine avec Zagreb est si vive que les supporters de la capitale qui font le voyage doivent changer leur plaque de char pour éviter qu'on les pousse dans l'Adriatique. Je vous rappelle que Zagreb et Split étaient du même bord durant la guerre il y a vingt ans. J'ai fais mon touriste low-profile cette journée-là.

Two-word poem

Une auteure m'a déjà dit que l'oxymore était l'incarnation de la perfection dans la langue française. Plus qu'une contradiction, un équilibre entre deux mots qui rend la vérité exprimable. Vu par un marxiste, thèse+antithèse=synthèse. C'est tellement vrai (l'oxymore, pas la lutte des classes).

Il n'est pas question d'oxymore ici, mais de poésie-pop. Deux mots, un poème, une idée amusante.

14/06/2010

Écouter un film de Bergman ou regarder les biscuits qui cuisent dans le four.

Deux articles convergents à lire d'urgence:

1. Des dommages que peuvent causer les nouvelles technologies à notre cerveau: un cas extrême mais révélateur.

2. "Je rêve d'un monde où l'on s'adonnerait à rien avec zèle, rigueur et régularité."

13/06/2010

Dépasser sur un trottoir

Le gars d'en avant te gêne parce qu'il est trop lent. Tu te demandes si c'est toi qui est trop pressé, si après tout tu devrais prendre ton temps et respirer un peu. Tu essaies, ça ne fonctionne pas. Le problème, c'est qu'il n'y a pas une si grande différence entre la vitesse à laquelle marche le gars et celle que tu préférais. Sinon le dépasser serait trop facile.

Tu fonces, nerveux, mais sûr de toi. En chemin, tu te questionnes une fois de plus sur la nécessité de l'entreprise. Non, renoncer n'est plus possible. Do or die. C'est rendu à sa hauteur qu'il ne faut pas craquer. L'inconnu voit très bien que tu n'es pas à l'aise à cette vitesse de croisière. En croisant son regard, tu feins la désinvolture. Rien n'y fait; il sait par quels questionnements tu es passé quelques secondes plus tôt. Les battements de coeur qui font vibrer ton t-shirt t'ont trahi.

Tu es finalement en pôle position. Mais juste quand tu pensais sabrer le champagne, tu te rends compte que si tu ralentis trop, le dépassé va te trouver ridicule. Alors tu maintiens le rythme, brûlant tes dernières calories disponibles. Et à la première occasion, tu changes de trottoir.

11/06/2010

Privé, heureux.

L'irritation gagnent les endroits les plus vulnérables de mon corps, mon coeur crie à l'aide, mon esprit est assailli par toutes sortes de pensées. C'est la même chose à chaque course. Surtout, c'est le 5 septembre qui me fait rêver autant qu'il m'angoisse. Tantôt moi qui me projette dans trois mois débordant d'émotions, tantôt la peur des obstacles qui pourraient m'empêcher de réaliser cette folie. Ces obstacles qui me hantent, c'est une température de 35 degrés celsius à l'ombre le jour de la course, un rhume ou une intoxication alimentaire à La Moulerie une semaine avant, une cheville foulée au basket, un vélo qui me rentre dedans, un tueur en série qui m'assassine sans raison. J'étais décidé à arrêter toute consommation d'alcool pour le dernier mois, j'evisage maintenant la glaciation.

La course, c'est aussi la période de gestation des chroniques. Les idées de phrases qui rentrent, s'accrochent ou sortent de mon esprit. La cohérence de mes pensée est inversément proportionnelle à la détresse de mes jambes. Mon mental perd de son toughness dans les côtes en montant, ou durant les strides, ces sprints de 100m qui te liquéfient les mollets. Le tout culmine en un moment d'insoutenable pression durant lequel la douleur, si vive, pulvérise la frontière entre le corps et l'esprit et s'empare de tout mon être. Il ne s'agît alors que de tenir bon, de se dire que "ça va aller mieux tantôt". Et quand tout est fini, comme dans un conte de fée, ça va effectivement mieux. Une leçon de vie en soi. Les idées se remettent en place. Puis, la douche, les étirements, les pâtes et une histoire courte de plus.

Je suis arrivé à mi-chemin de mon entraînement de six mois lundi dernier. Ce que j'apprécie tant de l'expérience à date c'est, tenez-vous bien, toutes les choses auxquelles j'ai dû renoncées. Faut dire que courir m'ennuie pour mourir. Manger du pain intégral et faire une place à mon entraînement dans mes journées surchargées, ça par exemple... Aucune autre phrase ne saurait le dire mieux: la privation m'enchante! Tellement que j'en fais plus que ce qui est dit dans mon livre. Je suis convaincu, par exemple, que de manger des pâtes intégrales a un effet à peu près nul sur mes performances. Pas grave, j'ai la soif de vaincre d'un Michael Phelps à Pékin. Je me trouve bête, ça me fait rire.

Ça fait longtemps que j'ai découvert les joies de la privation. Les expéditions de canot de mon adolescence m'ont tout appris. À seize ans, l'idée de partir vingt-et-un jours avec deux paires de boxer et du thon en boîte dans mon sac m'intriguait autant qu'elle m'effrayait. Mon confort et l'abondance dans laquelle j'avais été élevé allaient en prendre un coup. Je passerais de pacha à coureur des bois. Aujourd'hui, j'en garde des souvenirs magiques. Jamais je n'ai eu de discussion à propos de sous-marins géants poulet-teriyaki à nouveau. Ni fantasmé autant sur une douche chaude. Ni apprécié autant une paire de bas sèche après une journée à être agressé par une pluie incessante. Ces plaisirs-là sont impossibles sans la privation, sans l'absence de ce que l'on désir tant. Que nous répondrait Buda, pour qui désir est synonyme de souffrance? Un ténébreux débat philosophique s'annonce.

Ce dont je suis sûr, c'est que l'abondance peut être la pire des menteuses parfois. Parce qu'elle est si éblouissante, elle nous rend aveugle. La richesse nous entoure, mais on est incapable d'en extraire tous les fruits. C'est un drame. Je pèse mes mots.

Ce qui est génial à propos de la privation, c'est que c'est très abordable. Quoique ce n'est pas toujours le cas...J'ai du venir m'établir en Slovénie pendant cinq mois pour qu'elle s'insère dans mon quotidien. Outre l'entraînement, ma vie à Ljubljana regorge d'exemples de plaisirs qui jamais ne serait possibles dans ma bulle montrélaise. J'ai souffert durant le premier mois d'infernales courbatures dûes à mon oreiller incapable de m'offrir confort et apaisement en route vers le pays des rêves. Contrairement aux pâtes de blé entier, cette privation était on ne peut plus involontaire. Mes talents d'écrivains sont trop encore trop limités pour vous expliquer le bonheur que m'a procuré le coussin de chaise de patio acheté début avril. Je l'utilise et le chérie tous les jours.

09/06/2010

Pour la lutte au décrochage...

Pourquoi on a pas de concours comme celui-là dans les écoles au Québec. Dieu sait que j'étais le préféré des profs. C'est sûr que j'aurais été aux premières loges.

07/06/2010

Condamnés?

Amin Maalouf disait dans les Identités meurtrières, livre essentiel, que les différentes identités -religieuse,ethnique, linguistique- mènent très souvent aux dérives les plus graves: guerres, exactions, génocides. En affirmant qu'elles sont changeantes au gré des aléas de l'histoire, Maalouf les définit en quelque sorte comme des fictions.

Dans son nouveau roman, Nancy Houston dit des identités qu'elles sont des fictions qui nous gardent en vie.

J'ai tendance à croire les deux.

S'agît-il d'une tragédie? Serons-nous pris à jamais dans ce cul-de-sac?

05/06/2010

Pour le retour à la dactylo

J'entame à partir d'aujourd'hui une longue et féconde réflexion sur l'obsessif et le compulsif dans nos sociétés. Parenthèse: je déteste l'expression "dans nos sociétés", complètement surutilisée, c'est l'absence de style même. Elle se retrouve ici -pour la première et dernière fois- que pour pluger mon commentaire. L'obsessif et le compulsif, donc, qui nous rongent de l'intérieur un peu plus à chaque jour. Si vous pensez être immunisés, détrompez-vous. À quand remonte votre dernière visite sur Hotmail, Facebook, Twitter, sur votre iPhone? Bon, dans tous les domaines il y a des irréductibles qui ne cèdent pas à ces inventions du diable. Mais pour un Victor Lévy-Beaulieu qui écrit paisiblement à la chandelle dans sa cabane à Trois-Pistoles, il y a cent fuckés comme moi, comme vous, qui errent dans Internet pour n'en ressortir que des heures plus tard après y avoir frôlé l'overdose.

Déterminé à donner une pause à mon pouce qui n'en pouvait plus de tourner en rond, j'ai enfermé mon iPod dans ma trousse de toilette jeudi dernier. Pu capable de constamment être à la recherche de la prochaine chanson. L'objectif était de ne pas écouter de musique pendant une semaine. J'ai tenu deux jours. Un échec patent. De la détermination, j'en ai autant que ça.

J'entends régulièrement des histoires d'horreur à propos de l'étude et des gens de ma génération. Un gars sur Facebook qui a comme statut:"Perdu six heures à regarder des photos aujourd'hui au lieu de lire les cent pages pour l'examen de demain." Six heures. Je me demande quel genre de monde on va avoir lorsque ma génération le gouvernera.

J'ai moi-même vécu un cauchemar aujourd'hui. Je devais écrire cinq pages sur les Balkans et les origines de la Première Guerre mondiale, avec un hangover en prime. Très peu réjouissant comme programme me direz-vous. En effet. Mais ce qui devait être fait devait être fait. Et n'a pas été fait. Parce que Youtube, parce que Voir.ca, parce que Twitter et j'en passe. Si seulement j'avais eu une dactylo au lieu de mon laptop devant moi.

Vers 20h je suis allé courir pour me libérer de toute cette stagnation intelectuelle. Me gaver d'autant de divertissement n'a fait qu'échouer mon objectif qui était disons le assez modeste. Et surtout, je n'ai pas retiré grand chose des vidéos de Kobe Bryant ou d'Iam-quelle ironie, je vous les mets en lien...

Là je vais devoir vous laisser, j'ai douze pages à écrire pour demain.

03/06/2010

"The pursuit of perfection"

Je la prends blanche comme dans l'annonce.

02/06/2010

J'ai un projet: devenir fou.

C'est d'Émile Nelligan.

Une phrase qui ne cesse de me faire réfléchir depuis plusieurs semaines. Ce "projet"-là, il est en moi depuis longtemps. C'est probablement pourquoi j'ai été interpellé lorsque j'en ai entendu parlé dans le documentaire de Jacques Godbout sur Hubert Aquin. Ça eu l'effet d'une révélation. Sans blague. Il y a des phrases, comme des livres ou des films qui nous en apprennent sur nous.

Vous comprendrez mieux ce que Nelligan veut dire à la trente-et-unième minute. Les cinquante-cinq autres sont tout aussi intéressantes.

Vous remarquerez à quel point le français de 1979 ne sonne pas du tout comme celui de 2010. Un signe de son déclin? C'est bien le même Godbout qui prédisait il y a quelques années la mort prochaine de notre langue...