18/05/2010

Urbania n'a pas voulu de moi

Pour leur prochain numéro spécial sur l'âge d'or, Urbania offrait la chance à un talentueux inconnu de publier son texte. Je pensais être la personne toute désignée. Ils m'ont dit ceci: "Désolé, mais on ne publiera pas ton texte." Mon ego en a pris un coup, mais mais n'ayez crainte, il est toujours aussi démesuré. Alors, le voici, le texte qui ne permettra pas à Urbania de remplir les coffres vidés par la conjoncture économique. Ça s'appelle Avoir le dernier mot.

Lever à 7h15, douche à 7h20. S'ensuit café noir, pamplemousse et une toast et demie au beurre d'arachides. 10h30, c'est l'heure du Scrabble avec Yvonne. Ça empêche les toiles d'araignée de s'installer dans les neurones. Le Journal de Montréal et Radio-Canada en background auront assez à offrir pour combler l'après-midi et la soirée.

L'univers du vieux est un d'habitudes. Un militaire de carrière s'y trouverait à son aise. La répétition exacte, chirurgicale de chaque élément de leur routine est fascinante. Cette journée mille fois répétée, c'est un cocon imperturbable. Tout est prévu, rien ne peut arriver. Le gin coupé au 7up d'aujourd'hui va avoir le même goût que tous les autres d'avant. La cigarette de 5h va être tout aussi agréable, un brin grisante. Surtout, rien de trop surprenant ne va arriver à la polyvalente Sainte-Jeanne-d'Arc dans Virginie. Mais ça ne peut pas toujours être ainsi. Une simple sortie à la Casa Grecque, par exemple, constitue une violente secousse sur le sismographe de leur existence tranquille. De même, Noël, qui pour la plupart est associé à boisson et retrouvailles, est pour le vieux synonyme d'angoissantes planifications, à savoir: "Faut pas que j'oublie le gin, faut pas que j'oublie le 7up", "T'es tu sûr que y'on des glaçons chez Guy?"

Les habitudes des vieux ne sont que l'exacerbation du petit control-freak en nous. Avec le temps, cette propension à vouloir maîtriser son environnement enfle, et mue en habitudes de vieux. Pourquoi? À mon avis, on tente de s'accrocher. Notre mort est la dernière chose sur laquelle nous avons du contrôle. Et ça, ça fait peur. À mesure qu'on s'en approche, on essaie de se faire croire qu'on est pas juste une marionnette, que c'est nous qui tenons les cordes. On ne boit plus son gin que pour le plaisir, on le boit parce qu'on sait qu'il y en aura un autre demain à la même heure. On tente inconsciemment de calmer le shake intérieur qui nous habite. On tente d'avoir le dernier mot contre celle qui gagne toujours.

La vie, pour la majorité d'entre nous, semble être divisée en trois étapes quasi-étanches. L'enfance, l'âge adulte, et être un ptit-vieux. C'est cette impression d'étanchéité qui nous fait croire qu'un adulte ne peut plus être un enfant, et qu'un ptit-vieux est une drôle de créature. Même quand on pense à notre propre vieillesse, on se voit comme une autre personne.

Il faut l'admettre, on regarde parfois les vieux et leur monde avec curiosité et stupéfaction. Certains d'entre eux diront même que la société leur manque de respect. La preuve, peut-être, c'est qu'on redoute de devenir nous-mêmes un ptit-vieux avec des habitudes. Cette distance qui nous sépare d'eux, et qui peut être à l'origine de frictions intergénérationnelles, elle trouve peut-être son origine dans le fait qu'on oublie de se mettre à leur place dans leur pantoufles en phentex. Dealer au quotidien avec sa mort, incapable de le concevoir jusqu'à ce que le temps nous y contraigne.

La prochaine fois que vous verrez votre grand-maman piquer une colère parce qu'elle a oublié ses cigarettes et que "les Benson, c'est pas pareil que les Craven A", imaginez-vous dans quarante ans. Vous serez pareils.

3 commentaires:

  1. dsl Charles, mais c'est pour ça que je manque de respect envers les journaliste. Ils écrivent trop sur des choses qu'ils ne connaissent pas........... Ton texte c'est un préjugé

    Marc-Vincent

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  2. +1 pour Marc-Vincent

    oui, avec des préjugés, mais aussi réducteur et condescendant qui fait dans la généralisation, et agrémenté de beaux clichés.

    À noter que Charles n'est pas un journaliste, et que les vrais ont su reconnaître l'imposture.

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  3. Pkoi le commentaire de Flix a été supprimé???

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