25/02/2010

Notre civilisation en dépression ou le complexe Avatar

Les célébrations suite à la victoire contre l'Église n'auront duré que quelques années. Le vide laissé par la religion, chassée de nos sociétés et de nos consciences, nous a laissé stupéfaits. Que fait-on maintenant...
Qu'on en soit conscient ou non, nous sommes à l'heure où il faut repenser notre spiritualité, rouvrir une porte que certains souhaitaient fermée à jamais. Puisqu'il serait inconcevable et frustrant de revenir en arrière, on regarde maintenant ailleurs, frémissant parce qu'on ne sait pas ce qu'on cherche. Les secrets de Confucius? La conception de l'environnement amérindienne? Le thé tibétain traditionnel? La médecine douce nippone? Nos cinq sens en sont assaillis. Même Les saisons de Clodine ne peuvent s'empêcher d'aborder un de ces sujets à chaque semaine:"Cette semaine, on part à la découverte des secrets de l'Orient..." Ouin.
Comprenez-moi bien, je suis le champion de la curiosité. Rien n'est inintéressant à mes yeux. Cette ouverture aux autres cultures me réjouit et, je dois l'admettre, j'envie mes amis qui croient en quelque chose de plus grand que leur petite existence. Ce qui me rend mal à l'aise par contre, c'est ce discours d'adulation de l'Autre (disons l'Orient et les Amérindiens) qui occupe trop d'espace. Nous, colonisateurs sans scrupules et adorateurs de sciences et de raison, avons péché. Et eux ont tout compris à tout. Le ying, le yang et j'en passe.
Ainsi, s'automutiler à la première occasion est très tendance. Tenez, je lis en ce moment un essai sur les racines amérindiennes de l'identité canadiennes. L'auteur prétend que les sociétés française et américaine sont obsédées par l'État-nation monolithique et que nos religions judéo-chrétiennes pêchent par leur vision manichéenne du monde. La propriété privée est aussi au banc des accusés, bien entendu. Au sujet des Amérindiens, il souligne leur remarquable capacité d'intégrer les étrangers dans leur "cercle", leur respect de la nature, leur goût pour la négociation plutôt que la guerre. Ces propos me semblent justes, du moins d'après le niveau de connaissances que j'ai sur le sujet. Mais je doute que l'on doive avoir une attitude négative systématique au sujet de composantes fondamentales de notre identité. Doit-on effacer le nom de Descartes des livres d'école, bannir à jamais la méthode scientifique, pitcher nos éprouvettes d'antibiotiques dans les toilettes, brûler le concept d'entreprise privée sur la place publique. Non. La réponse à notre crise existentielle collective n'est pas manichéenne.
Tout ça m'est venu en tête la semaine dernière au cinéma en regardant des bonhommes bleus avec des lunettes 3D. La fable hollywoodienne met en scène des méchants humains venus exploiter des sables bitumineux extraterrestes et des indigènes angéliques. Très vite, on comprent qu'il faut prendre pour ceux qui parlent aux arbres-pas les humains-parce qu'on a beau chercher, on ne leur trouve pas de défaut. Les humains, eux, sont cupides, arrogants, têtus et violents. Le héros finit par choisir de devenir un indigène. En sortant de la salle, je me suis dit que dans l'fond, ce n'était pas un hasard si j'avais une impression de déjà vu. Le propos d'Avatar ne pourrait être plus hollywoodien et le discours évoqué plus haut l'est tout autant.
Comment se fait-il qu'un nombre si important de commentateurs ne soient pas capables de plus de nuances que le scénario archi-prévisible d'un blockbuster américain. Sommes nous complexés au point de ne pas pouvoir faire la part des choses. Moi en tout cas, le thé tibétain, j'ai essayé et ça goûte mauvais.

3 commentaires:

  1. Viens pas me dire que tu te lances dans le vide sans hésiter quand tu te retrouves au bord d'une falaise. Essaie même pas, je l'sais que comme tout le monde, tu vas faire un pas en avant et tout de suite, deux en arrière. Tu vas contempler la hauteur, te demander si tu vas pogner un flat au petit orteil en touchant l'eau, si c'est pas un peu niaiseux de sauter finalement...

    Ce que j'essaie de dire - et ça résume un peu ton propos - c'est que tout reste à faire, que justement on est tellement dans le vide que les ''penseurs'' ne savent pas où se pitcher et qu'ils se rabattent sur des idées qui ont fait leurs preuves. NOUS (occidentaux que nous sommes) savons pertinemment que nous avons péché et que notre style de vie ne pourra perdurer sans endommager ET l'environnement ET les groupes opprimés ET la ''survie'' de la société telle que nous la connaissons. Il faut donc faire quelque chose. Plusieurs théories sont avancées, mais il semble évident que les commentateurs publics ne veulent pas nécessairement faire un ''flat'' sur leur petite orteil, préférant rester en ligne avec l'opinion populaire. Par rapport à ton M. Saul: N'essaie-t-il pas juste de choquer en mettant tous les concepts de notre société généralement reconnus au banc des accusés? Je te pose la question...

    P.S: On sent que la Slovénie s'empare de toi tranquillement...quelques fautes se profilent à l'horizon. J'espère que le slovène ne deviendra pas la langue de prédilection de ce blogue! ;)

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  2. Concernant Saul, il veut rectifier l'image que se font les Canadiens d'eux-mêmes en expliquant que notre histoire est intimement liée à celle des Amérindiens.

    Pour ce qui est de nos péchés, je ne prétend surtout pas qu'on est blanc comme neige. Je me méfie seulement des discours qui font l'apologie d'une culture et qui en condamne une autre.

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  3. On ne peut que trop facilement condamner ce que l'on connaît, mais il est vrai que d'aduler une culture dont on ne connait pas tous les détails, ni les revers peut avoir un effet pervers si on en adopte les moeurs trop rapidement. Je fais mon ptit baveu d'actualité, mais prends par exemple la disparition du thon rouge depuis que les sushis ont atteint l'Amérique du Nord...

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